
Annabelle Chauviteau, archéologue et responsable du service Patrimoine à la mairie de L’Île-d’Yeu, lors d'une fouille
À l’île d’Yeu, l’érosion révèle des squelettes vieux de 3000 ans

Annabelle Chauviteau, archéologue et responsable du service Patrimoine à la mairie de L’Île-d’Yeu, lors d'une fouille
L'île d'Yeu regorge de trésors archéologiques, dont certains viennent d'apparaître ! En effet, des découvertes de vestiges sont de plus en plus fréquentes avec le recul du trait de côte.
Si l'érosion côtière en est la première responsable, elle oblige à agir en urgence pour éviter qu'ils ne soient définitivement perdus.
Des fouilles exceptionnelles
La pointe de Gilberge a retrouvé son calme habituel.
Seuls quelques indices, comme un tapis en fibre de coco (voir ci-contre), qui doit aider la végétation à réinvestir le lieu, rappellent qu’une fouille archéologique de grande ampleur s’est déroulée sur cette plage bien connue des habitants de l’île d’Yeu. En 2024, des ossements humains datant de l’âge du Bronze ancien, soit à peu près 1 600 ans avant Jésus-Christ, ont en effet été découverts au niveau de cette dune qui borde le littoral.

Au total, ce sont six squelettes qui ont été exhumés, dont deux qui se trouvaient dans des coffres funéraires en pierre.
Pour mener à bien cette fouille, Annabelle Chauviteau, archéologue responsable du service Patrimoine à la mairie de L’Île-d’Yeu, a pu compter sur l’aide de plusieurs confrères venus spécialement du continent pour participer à cette découverte exceptionnelle.
Des fouilles d'urgence
« La Direction régionale des affaires culturelles (Drac) des Pays de la Loire a reconnu le potentiel incroyable de l’île d’Yeu. Grâce au dispositif Yeu Zone Atelier, j’ai pu m’installer ici, où j’ai grandi, avec un emploi à temps plein pour m’occuper du service Patrimoine et réaliser des fouilles d’urgence. C’est assez paradoxal parce qu’on découvre de véritables trésors archéologiques grâce à l’érosion côtière. Et en même temps, c’est un phénomène qui menace de faire disparaître ces vestiges qui ont pourtant traversé les millénaires. C’est d’ailleurs pour cette raison que j’ai pu être aidée par d’autres archéologues », détaille cette passionnée de la Préhistoire.
Une découverte qui a été rendue possible grâce au dévouement des habitants de l’île d’Yeu. « J’ai constitué un réseau de promeneurs qui m’aident dans mes recherches et c’est grâce à l’un d’entre eux qu’on a su qu’on se trouvait sur un lieu à vocation historique. Il pensait avoir découvert un boulet de canon mais c’était le crâne d’un des squelettes qu’on a déterrés ! »

L'Île d'Yeu, une terre de vestiges anciens
S’il s’agit des premiers vestiges humains de cette époque reculée découverts dans la région, d’autres fouilles avaient été menées au préalable sur d’autres sites de l’île.
« Une fouille à la plage de La Pulante, qui était menacée par l’érosion, a mis en lumière un aménagement côtier de la fin de la Préhistoire (3000 av. J.-C.) avec une zone de taille du silex et un aménagement permettant de canaliser un petit ruisseau d’eau douce. C’est une découverte exceptionnelle », tient à rappeler Annabelle Chauviteau.
Les interventions sont donc de plus en plus complexes en raison de l’érosion mais aussi des nombreux trésors archéologiques qui se trouvent sur l’île vendéenne, à l’image du Dolmen de la Planche-à-Puare, classé Monument historique depuis 1889. « Il n’y a pas de petite découverte. Toutes ces fouilles nous donnent des indications sur les mouvements de populations et les échanges qui ont pu exister entre ces dernières. Cela nous permet de mieux comprendre leur savoir et leur culture ainsi que leurs spécificités, et ce même s’il y a encore énormément de zones d’ombre. On avance petit à petit. »
L’île d’Yeu compte désormais plusieurs sites archéologiques d’époques différentes avec des ossements allant de la Préhistoire à aujourd’hui. « Sur la côte nord-ouest, j’étudie un ancien cimetière de noyés ayant révélé 21 individus en tout. Le petit dernier est encore sur place. On doit l’exhumer en mai. Il y a encore beaucoup de travail ! » Du travail, et de superbes découvertes en perspective.