Armel Le Cléac'h était présent sur le village avant le grand départ du Vendée Globe
La passion du sport
Publiée le 12 Novembre 2024
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Pronostics, nouveau record, environnement... Armel Le Cléac'h se confie sur le Vendée Globe

De retour aux Sables-d'Olonne à l'occasion du Vendée Globe, le recordman du meilleur temps de course (74 j, 3 h et 35 min) se confie sur l'édition 2024. Rencontre.

Armel Le Cléac'h était présent sur le village avant le grand départ du Vendée Globe

Il avait remporté l'Everest des mers en 2016, empochant par la même occasion le record de l'épreuve. Armel Le Cléac'h s'est confié sur de nombreux sujets sans éluder les plus sensibles.

Rencontre avec l'un des skippers qui a marqué le Vendée Globe de son empreinte.

Vous disiez auparavant que le Vendée Globe était la course la plus médiatisée et la plus connue du grand public. Est-ce toujours le cas ?

Armel Le Cléac'h : Il y a des chances, oui ! Le Vendée Globe reste une course qui est très suivie par le public français notamment, mais pas seulement. Aujourd'hui, elle est inscrite dans l'histoire de la course au large avec tout ce qui s'est passé lors des éditions précédentes.

On a beaucoup de souvenirs de cette grande épopée. C'est aussi pour cela qu'aujourd'hui on voit tout ce monde aux Sables-d'Olonne, ce grand public qui est présent depuis l'ouverture du village !

Remporter une seconde fois le Vendée Globe (comme Michel Desjoyeaux) fait-il partie de vos objectifs futurs ?

Armel Le Cléac'h : On verra... Aujourd'hui, j'ai la chance de naviguer en Ultim. Ce sont des bateaux incroyables qui ont une autre dimension que les Imoca, qui sont derrière moi. Ce sont des bateaux qui vont beaucoup plus vite, qui sont beaucoup plus grands, qui nous passionnent énormément et avec lesquels j'ai eu la chance de faire un tour du monde en solitaire. C'était mon quatrième tour du globe, avec un temps de 56 jours !

Dans 4 ans, il y aura une autre édition de ce tour du monde en Ultim, et j'ai envie d'y retourner. Le Vendée Globe pour l'instant... j'y ai passé beaucoup de temps. J'ai eu la chance de le faire 3 fois et de terminer 3 fois sur le podium. Je vais suivre avec beaucoup d'attention cette 10e édition et on verra pour la suite.

Sébastien Simon (skipper du Vendée Globe 2024) disait que les marins peuvent subir entre 4G et 6G d’accélération. Comment s'y préparer ?

Armel Le Cléac'h : Dans les Imocas aujourd'hui, on a beaucoup d'ingénierie, beaucoup de gens qui travaillent édition après édition pour les faire progresser dans le bon sens, tout en gardant une certaine sécurité, une certaine fiabilité pour que les marins s'y retrouvent. Il ne faut pas aller dans le n'importe quoi mais je pense que la classe IMOCA, qui gère et qui continue de mettre en place les règlements autour des bateaux, utilise à bon escient ces arguments et les retours d'expérience pour garantir la sécurité des skippers.

Aujourd'hui, les bateaux sont des laboratoires pour le monde de la plaisance, de la navigation. Mais ce sont aussi des laboratoires qui s'inscrivent dans un système qui profitera au monde du transport de demain, au transport de fret ainsi qu'au transport de passagers. On parle des foils sur des bateaux à passagers, voire même sur des cargos dans le futurL On parle des voiles sur des bateaux qui transportent des containers ! Il faut continuer à travailler en ce sens.




Au fait, comment se passe la vie au coeur d'un Imoca ? Sébastien Simon avait ouvert les portes de son bateau, (re)découvrez le quotidien mouvementé du skipper !

Vous parlez de laboratoire. 25 skippers embarquent des capteurs scientifiques : est-ce que cela vous semble compatible avec un tour du monde en solitaire, sans escale et sans assistance ?

Armel Le Cléac'h : Oui, je pense qu'on est tous concernés par l'évolution de notre terrain de jeu. C'est là-dessus qu'on navigue donc il faut le sauvegarder et le préserver. Je pense que la partie scientifique, à laquelle certains skippers vont participer, n'est pas prépondérante dans leur course. Cela va leur prendre un tout petit peu de temps dans leur tour du monde. Je pense que ce n'est pas cela qui va les freiner, qui va les ralentir ou qui va leur faire perdre du temps. Je pense que c'est important de pouvoir le faire.

On a des bateaux qui vont aller dans des endroits où finalement très peu d'humains vont au quotidien, voire même jamais... Les mers du Sud notamment. Ce sont des endroits très peu fréquentés. Donc c'est bien d'utiliser le passage de ces bateaux une fois tous les 4 ans pour aller faire des relevés ou en tout cas poser des balises ou autres systèmes scientifiques qui peuvent être importants pour l'étude de notre milieu océanique.

En tant que recordman du Vendée Globe, qu'est-ce que vous dites à ces skippers qui se lancent dans cette incroyable aventure ?

Armel Le Cléac'h : Qu'ils profitent vraiment de cette grande course qu'ils préparent depuis des années. Certains pour la première fois. Cela va être un moment unique. Ils s'en souviendront toute leur vie et j'espère qu'il y aura un maximum de bateaux à l'arrivée. Il faut qu'ils en profitent. C'est surtout ça le maître mot. Profiter.

Est-ce que vous vous êtes imaginé faire un tour du monde à 23 ans comme Violette Dorange ?

Armel Le Cléac'h : Pas du tout ! Je suis admiratif de ce que fait Violette. En plus, elle mène de front beaucoup de choses à haut niveau. Elle est étudiante à l'INSA, à Rennes, que je connais parce que c'est une école d'ingénieur que j'ai faite aussi. Et franchement c'est quelqu'un qui met beaucoup d'énergie dans tout ce qu'elle entreprend. Que ce soit sur l'eau ou à terre. Avec beaucoup de sourire et beaucoup de simplicité. Je pense qu'elle embarque déjà beaucoup de monde avec elle pendant toute cette aventure. Je lui souhaite bien sûr de réaliser son rêve, c'est-à-dire de revenir aux Sables-d'Olonne dans plusieurs semaines. Et d'accomplir ce premier tour du monde qui sera pour elle un grand moment. Elle a un bateau assez magique aussi, une légende pour le coup, celui de Jean Le Cam. J'espère que cela lui portera chance.


Jean Le Cam face à Violette Dorange : l'interview croisée exclusive cliquez sur l'image pour la découvrir !

Et à 65 ans alors, comme Jean Le Cam : est-ce que vous voyez faire un tour du monde à cet âge-là ?

Armel Le Cléac'h : ...Non plus ! C'est une autre admiration. Jean, c'est un Avengers. C'est quelqu'un qui ne vieillit pas. C'est un marin qui est reconnu depuis longtemps et surtout qui passionne les foules. On a tous suivi son sauvetage il y a 4 ans avec Kévin Escoffier. Ça a été un grand moment de l'histoire du Vendée Globe. Il revient cette année avec un nouveau bateau, un bateau à sa main, un bateau qu'il a conçu, qu'il a imaginé. Il va nous faire rire, il va nous faire vivre son aventure. Là aussi on lui souhaite bien sûr d'aller au bout !

Parce qu'un Vendée Globe avec Jean Le Cam à l'arrivée, c'est un Vendée Globe réussi.

Est-ce que vous pensez que votre record sera battu ?

Armel Le Cléac'h : Oui, bien sûr ! Le record est fait pour être battu. Il est largement battable parce que les bateaux ont largement progressé depuis 8 ans. En 2016, on avait été les premiers à être au départ avec des foils avec Banque Populaire, et avec certains autres bateaux. C'était des petits foils à l'époque. Depuis, les bateaux sont beaucoup plus performants. Ils peuvent aller chercher les 70 jours, c'est tout à fait possible. Mais il faudra que la météo soit au rendez-vous ! Elle ne l'a pas été il y a 4 ans.

C'est un peu une affaire d'alignement des planètes, donc on verra. Mais les marins et les bateaux sont prêts pour cela. J'espère que le record sera battu.

Un pronostic pour ce Vendée Globe 2024 ?

Armel Le Cléac'h : Il y a beaucoup de prétendants à la victoire, du moins au podium.

Beaucoup de duos skippers/bateaux qui sont bien préparés, bien armés. Mais s'il faut en citer 5, que je ne dirais pas forcément dans l'ordre, il y a Charlie, Dalin, Jérémie Beyou, Yoann Richomme, Thomas Ruyant. Et puis je mettrais Samantha Davies. En tout cas, ce qui est sûr, c'est qu'on aura un bateau à foils qui sera en tête à l'arrivée du Vendée Globe ! Ce sera sûrement un bateau de cette dernière génération, un bateau qui a été construit depuis la dernière édition.

J'en ai cité 5, mais il y en a d'autres qui sont capables de le faire. C'est très ouvert, on le sait, l'aventure est longue. On l'a vu il y a 4 ans, Yannick Bestaven qui a gagné le Vendée Globe avec brio, n'était pas forcément dans la liste des favoris au départ. Donc il peut y avoir des surprises.

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